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Le Rucher des Montagnes Bleues
La présence des abeilles sur Terre remonterait, d'après les scientifiques,
à 60 millions d'années. Des fossiles mis au jour par des archéologues présentent des abeilles qui semblent très proches de celles vivant
de nos jours.
Le mode de vie des abeilles n'aurait pas beaucoup changé depuis ces temps reculés. Leur comportement semble inné, et se reproduit depuis des temps immémoriaux...
L'homme a semble-t'il, toujours cherché à récolter et consommer du miel, comme l'atteste de très anciennes peintures rupestres représentant l'activité relativement risquée de la "chasse à l'abeille"... (image a ci-contre)
Des traces de miel et de cire d'abeille mises au jour au Proche-Orient, en Europe, et en Afrique du Nord, démontrent leur utilisation 9000 ans avant notre ère. (1)
On ne peut toutefois affirmer en l'état de nos connaissances historiques si cette utilisation des produits des abeilles ne remonte pas à des temps encore plus éloignés.
Ce n'est que plus récemment que l'homme "domestica" les abeilles,
mais il est difficile de fixer une date de ce que l'on pourrait appeler
les débuts de l'apiculture...
a- Peinture rupestre du Mésolithique découverte dans la
« cueva de la Araña » grotte de l'araignée près de Bicorp en Espagne représentant une chasse à l'abeille.
b- Les « abeilles de Malia » : bijoux en or retrouvé
en Crête qui représente deux abeilles transportant
une goutte de miel.
c- Tombe de Pabasa,
"Intendant de la divine adoratrice d'Amon" Nicotris I
à Louxor, Egypte.
Les Egyptiens, Assyriens, Chinois, Grecs (comme le montre ces bijoux de l'époque mycénienne (image b ci-contre) ) et Romains utilisaient déjà les produits récoltés, transformés ou sécrétés par les abeilles pour se soigner.(2)
2400 ans avant J-C, les Egyptiens ont pratiqué l'élevage des abeilles, dans des jarres en terre cuite ou des paniers en osier recouverts d'argile, cette activité fut immortalisée sur des gravures retrouvées dans des temples et tombes royales. (image c ci-dessous)
Dans l'Antiquité, le nectar était utilisé lors des rituels religieux ou comme offrande aux dieux. Du miel découvert lors de fouilles archéologiques en Egypte, vieux de 4000 ans, est toujours comestible.(3)
Hyppocrate, le père de la médecine (460-377 av J-C), disait que l'usage du miel conduisait à la plus extrême vieillesse, et le prescrivait pour combattre la fièvre, les blessures, les ulcères et les plaies purulentes.(4)
Chez les Celtes (1100-6 av J-C) qui buvaient l'hydromel, ou dans les traditions galloises, l'abeille évoque les notions de sagesse et d'immortalité de l'âme.
Chez les chrétiens, l'abeille est le symbole de résurrection, on la trouve figurée sur les tombeaux en tant que signe de survie après la mort.
Dans le tombeau de Chlidéric Ier en l' an 481, trois cent abeilles d'or furent découvertes, témoignant que la ruche était le modèle de la monarchie absolue.(5)
Napoléon Ier souhaitait que l'abeille soit un motif omniprésent, sur ses tapis comme sur son manteau de sacre.(6) (image d ci-dessous)
En Islam on retrouve de nombreuses références aux abeilles, le Coran fait explicitement allusion à la guérision à l'aide du miel :
" Et ton Seigneur a inspiré aux abeilles de prendre pour abri les montagnes,
les arbres et les constructions.
Butine ensuite toutes sortes de fleurs et avance, docile, sur les chemins
de ton Seigneur. De leur abdomen s'écoule un suc aux couleurs variées
recelant un remède déstiné aux hommes.
En tout cela il y a des signes pour un peuple enclin à la réflexion."
Sourate 16- Les Abeilles- Versets 68,69
Ceci n' est qu' un bref aperçu, en effet, on trouve tout au long de
l' Histoire de nombreuses traces archéologiques, orales, écrites ou peintes, présentes dans la littérature, l'art et les religions, qui témoignent de la fascination humaine pour le monde des abeilles.
L' habitat primitif des abeilles était à l'origine les troncs d'arbres creux, ou des excavations rocheuses. (image e ci-contre)
D'après les traces que nous ayons, les premiers apiculteurs utilisèrent des poteries, des corbeilles de paille ou d'osier tressé.
Ce type de ruche rendait toutes interventions difficiles...
En effet, ces pratiques impliquaient souvent de détruire la colonie pour pouvoir en extraire le précieux nectar.
De nos jours il existe encore des apiculteurs qui utilisent des ruches "tronc" dans les Cévennes, par exemple. ( http://www.ruchetronc.fr )
La ruche "tronc" est l'habitat qui se rapproche le plus de celui des abeilles vivant à l'état sauvage sous nos latitudes.
Au milieu du XIX éme siècle des apiculteurs eurent alors l'idée de créer des ruches à cadres, qui se présentent sous la forme de caisses en bois garnies de de cadres mobiles en bois, sur lesquels les abeilles construisent leurs rayons de cire. (image f ci-contre)
L' usage des ruches à cadres s'est alors répandu rapidement, ce fut ce que l'on pourrait qualifier de débuts de l'apiculture "moderne".
C'est ensuite la mécanisation qui permis le développement exponentiel de la transhumance, qui consiste à déplacer les ruches sur les lieux des différentes miellées au cours de la saison.
On peut toutefois constater que cette pratique, qui implique souvent de transporter les ruches sur de longues distances, provoque un stress sur les colonies et les affaiblis.
Cet affaiblissement résulte aussi du manque de diversité de pollens et de nectars, lié aux emplacements composés d'une essence florale principale, voir de monoculture. (image g ci-contre)
d- Aigle et abeille décorative utilsées
lors du sacre de Napoléon Ier en 1804.
(Musée de l'armée des Invalides. (7))
A l' avènement de l' ère industrielle et agricole "moderne", coïncide l'apparition du syndrome d'effondrement des colonies.
Un déclin des abeilles est constaté un peu partout sur la planète.
L'utilisation de pesticides et autres substances chimiques, par l'agriculture intensive leur cause de sérieux dommages. (image h ci-contre)
On attend toujours l'interdiction de ces poisons par les autorités, surtout que le point d'arrivée de ces molécules toxiques se situe dans nos assiettes...
mais c' est sans compter le poids et et le puissant lobbying des multinationales.
( https://www.topsante.com/medecine/environnement-et-sante/pesticides/pesticides-les-francais-fortement-exposes-31986)
La surexploitation des abeilles dans un but purement lucratif, comme pour
la pollinisation des amandiers en Californie, pour laquelle deux millions de ruches sont réquisitionnées, s' inscrit dans le même modèle intensif.
( voir le documentaire "Le mystère de la disparition des abeilles" ARTE ) (10)
L'apparition du Varroa Destructor (image i ci-contre) dans nos régions,
dans les années 80 est aussi devenu un problème pour la survie des colonies.
Il s'agit d'un acarien qui parasite les abeilles en se reproduisant dans
le nid à couvain.
Cette infestation a quasiment généralisé l' utilisation de traitements chimiques ( des acaricides entre autre ) dans les ruches chez la majorité des apiculteurs. On retrouve des traces de ces produits dans les cires et le miel. Je ne parle même pas des méthodes utilisées dans certains pays, dont les miels sont commercialisés en France...
A cela vient s'ajouter le frelon asiatique Vespa Velutina qui, arrivé dans les années 2000, est en train de s'implanter manière durable en Europe.
C'est un prédateur qui cause aussi de sérieux dégats aux abeilles.
(image j ci-contre)
e- Colonie d' abeilles ayant élu domicile dans un tronc d'arbre. (9)
f- Visite d'une ruche à cadres
g- Ruches sur une miellée de colza.
h- Epandages de pesticides sur des champs.
i- L'acarien Varroa Destructor.
j- Frelon asiatique et frelon européen.
En résumé, de nos jours les abeilles sont sujettes à de nombreux problèmes.
Mais on l'oublie souvent, ce ne sont pas seulement les abeilles qui sont concernées, mais bien l'ensemble des écosystèmes.
De plus l' abeille mellifère n'est qu'une espèce parmi des milliers d'autres insectes, dont certains ont déjà disparus sous nos latitudes.
( Voir l' article réf (11) en bas de page :Les insectes volants sont au bord d'une catastrophe imminente )
Alors que faire ?
Implanter des ruches partout pour sauver les abeilles comme certains le préconisent ?
Personnellement je ne pense pas que ce soit une solution, bien au contraire cela risque de saturer les espaces avec une seule espèce et ainsi rendre l'accès aux peu de ressources disponibles encore plus difficile aux autres insectes.
Je pense que les solutions se situent plutôt dans la préservation de la biodiversité, dans la sauvegarde et la création d'espaces naturels,
il s'agit aussi de réfléchir à notre place dans l'environnement autour
d'une notion essentielle :
L' Equilibre.
Créer de la biodiversité, ce serait par exemple recréer du bocage, des haies, dans les champs comme c'était le cas auparavant dans la plupart des campagnes françaises.( image k ci-contre )
On pourrait aussi encourager la plantation d'arbres et de plantes mellifères dans les aménagements communaux, et laisser se développer des zones naturelles dans lesquelles la faune et la flore pourraient prospérer.
Des initiatives comme les espaces de conservation de l' abeille noire
existent déjà...
A mon sens, cela demande une profonde remise en cause du modèle agricole productiviste.
En effet, ce modèle énergivore au rendement négatif ne sera pas tenable encore longtemps et ce pour de nombreuses raisons, ce qui serait long à développer ici. (Voir quelques éléments dans les article en bas de page (réf 13))
Une transition est plus que nécessaire, elle est vitale.
Pour cela, des méthodes comme le semis direct sous couvert, les cultures intercalées sont des pistes intéressantes déjà utilisées par certains agriculteurs.
(Voir le livre "Le sol, la terre et les champs" de Claude et Lydia BOURGUIGNON (12))
L'émergence de micro-fermes en permaculture très productives démontre qu' un autre modèle est possible, souhaitable, mais aussi rentable !
( http://www.sad.inra.fr/Toutes-les-actualites/Ferme-du-Bec-Hellouin-la-beaute-rend-productif )
( https://www.fermedubec.com/ )
(images l et m ci-dessus (sources images réf 14 et 15))
Produire mieux, de manière plus raisonnée, ça existe et ça fonctionne.
De nombreux exemples nous montrent qu' une autre agriculture respectueuse de l'environnement est bénéfique à tous, non seulement aux abeilles, mais à toute la biodiversité dans son ensemble.
k- Bocage en Normandie.
Crédit Photo Site : www.les-crises.fr
l- Ferme du Bec- Hellouin
m- Ferme du BecHellouin
Pour conclure, je pense que les symptômes qui touchent les abeilles sont là pour nous montrer que quelque-chose ne fonctionne pas.
S'occuper uniquement de ces symptômes serait, à mon avis, passer à côté du problème et ne pas voir les choses dans leur globalité. Nous savons bien que tout est interdépendant.
Aujourd'hui j'observe une sorte d'effet de mode autours de l'apiculture, et tout un "secteur de marché" qui va avec, sous couvert de se donner bonne conscience en prétendant sauver les abeilles...
Le souci c'est que l'apiculture actuelle se construit sur le même schéma biaisé que l' agriculture intensive.
Sauvons les abeilles, oui, mais mesurons bien par quel moyens nous pouvons y parvenir.
Prenons tout d'abord soin des milieux naturels existants.
Ensuite nous pouvons apporter des ressources aux insectes et à toute la faune dans nos espaces, plantons des arbres, des arbustes, des vivaces...
Revoyons nos méthodes apicoles avec une vue d'ensemble, en ayant conscience des besoins réels des abeilles.
Explorons de nouvelles techniques agricoles, ce n'est ni insurmontable ni improductif, bien au contraire, de nombreux exemples nous le montrent.
C'est aussi à chacun d'être responsable en favorisant les petits producteurs si possible locaux, qui travaillent de manière propre et raisonnée, il en y a de plus en plus.
Notre véritable pouvoir c'est d' agir chacun à notre petite échelle, par exemple consommer de manière à ne pas nourrir un système dont on ne veut plus.
Les abeilles ont beaucoup à nous apprendre, par leur fonctionnement, dans lequel le gaspillage est inexistant.
A travers les époques elles ont été observées comme un modèle de société pérenne voir sacré.
Sachons tirer les leçons de notre propre modèle de société à travers le message qu'elles nous portent.
" Elle porte en elle le mécanisme de l’univers :
chaque abeille résume le secret du monde."
Michel ONFRAY "La Sagesse des abeilles."
Notes et références:
(1)Roffet-Salque et al., "Widespread exploitation of the honeybee by early Neolithic farmers",
Nature, vol. 527, n°7577, pp.226-230, doi:10.1038/nature15757
(2)Les abeilles et le chirurgien. Pr Henri Joyeux Editions du rocher ISBN978-2-268-07331-6 p.20
(3)idem. p.22
(4)idem. p.23
(5)idem. p.28
(6)idem. p.29
(7)http://www.musee-armee.fr/collections/base-de-donnees-des-collections/objet/aigle-et-abeille-decoratives-utilisees-lors-du-sacre-de-1804-a-notre-dame-de-paris.html
(8)Michel Pastoureau, « L'homme et l'abeille », Concordance des temps, 28 janvier 2012
(9) image e issue de la vidéo https://www.youtube.com/watch?v=SvypuxNkJsY
(10) Le mystère de la disparition des abeilles Producteurs : ARTE FRANCE, TELFRANCE, GALAFILM
Réalisateur : Mark Daniels
Auteurs : Mark Daniels, Jane Weiner
(11) https://www.colibris-lemouvement.org/magazine/insectes-volants-sont-bord-dune-catastrophe-imminente?utm_content=buffer0d7f5&utm_medium=social&utm_source=facebook.com&utm_campaign=buffer
(12)Le sol, la terre et les champs. De Claude et Lydia BOURGUIGNON
Editions Sang de la Terre ISBN978-2-86985-188-7
(13) http://knowledge.cta.int/fr/Dossiers/S-T-et-defis-agricoles/L-epuisement-du-phosphore/Articles-de-fond/L-epuisement-du-phosphore-une-crise-invisible
http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/03/29/notre-consommation-alimentaire-epuise-les-eaux-souterraines_5102912_3244.html
http://www.mtaterre.fr/dossiers/comment-nourrir-9-milliards-dhommes-en-2050/nourrir-9-milliards-dhommes-le-defi-de-demain
(14) http://www.prechi-precha.fr/ecologie-la-permaculture-a-la-ferme-du-bec-hellouin-video/
(15) http://www.lemoniteur.fr/article/permaculture-la-foret-comestible-elargit-l-horizon-du-bec-hellouin-34616735
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